Manger des insectes comestibles ne date pas d’aujourd’hui ! Cette façon de s’alimenter, est actuellement pratiquée par près 2,5 milliards d’êtres humains (FAO) principalement sur les continents asiatiques, africains, et sud-américains. Mais il faut savoir que l’entomophagie – la pratique de manger des insectes – était également présente sur le continent européen. Mais que s’est-il passé sur notre continent pour que cette pratique alimentaire décline ? Pourquoi sur d’autres continents comme en Asie, en Amérique du Sud la pratique de manger insectes est restée ? C’est ce que nous allons tenter de mettre à jour.
L’entomophagie actuelle de part le monde
Si manger des insectes en France et en Europe est encore le lot d’une minorité, ça n’est pas du tout le cas à travers le monde ! L’entomophagie est très répandue principalement en Afrique, en Asie et en Amérique du Sud. En effet, sur ces continents, la consommation d’insectes est un acte parfaitement naturel qui s’intègre à l’alimentation quotidienne.
Ainsi, sur les continents asiatique, sud-américain et africain, l’entomophagie est parfaitement intégrée dans les us et coutumes alimentaires de chaque pays, qui voient dans les insectes comestibles une source de nourriture au même titre que d’autres viandes, poissons… En Chine, ou en Thaïlande par-exemple, il est très commun de rencontrer des marchands ambulants, proposant diverses spécialités, à base d’insectes, comme des brochettes de sauterelles grillées.
Les premières traces d’insectes comestibles
Les premiers hommes pratiquaient l’entomophagie. C’est ce que laisse supposer les restes de carapaces d’insectes retrouvées parmi des déjections humaines dans des grottes en Chine, au Mexique, voire même dans des cavernes sur le sol américain. Ainsi, diverses traces d’insectes comme des fourmis, des mites ou des coléoptères par-exemple, ont été analysées. Sans compter les différentes peintures rupestres qui font mention des insectes comestibles.
Dans le Nord de l’Espagne, certaines peintures rupestres datant de plus de 30 000 ans avant notre ère, décrivent différentes scènes relatant la consommation d’abeilles sauvages par l’être humain. Et encore, les restes d’insectes étant particulièrement difficiles à analyser on peut supposer que la pratique de manger des insectes remonte à encore plus loin ! Etonnant ? pas vraiment.
En effet, avant l’invention des outils nécessaires aux pratiques de la chasse, et de l’agriculture, les insectes représentaient une part importante de l’alimentation de l’Homme. Certains chercheurs avancent même que les insectes comestibles auraient particulièrement contribués à notre évolution.
Si l’on se penche sur une autre alimentation ancestrale telles que celle des aborigènes, on remarque qu’ils ont pour habitude de récolter des criquets, puis de les faire bouillir dans de l’eau salée, avant de les faire sécher au soleil, pour une consommation ultérieure.
Et en Europe ? les Grecs et les Romains raffolaient de criquets enrobés de miel, ainsi que de larves de coléoptères. Les cigales étaient également une nourriture particulièrement appréciée, et une source alimentaire économique.
En France, à l’époque du Moyen-Age, les Hommes consommaient régulièrement des larves de ténébrions meunier (vers de farine). A l’époque des soieries, le ver à soie était également mangé dans le sud de la France. Certains châtelains – Madame de Pompadour par exemple – offraient des beignets de hannetons à ses invités ! Alors que s’est-il passé pour que cette pratique tombe à ce point dans l’oubli ?
L’entomophagie : une pratique qui s’est fait oublier en Europe
Dans le monde occidental, l’entomophagie est actuellement considérée comme une pratique rurale, voire d’un autre temps. Cette coutume alimentaire soulève bien des débats, provoquant même le dégoût, voire une réaction de rejet de la part des occidentaux. Pourquoi y a t’il une telle différence en Europe occidentale et ailleurs où l’on mange des insectes ?
Au fur et à mesure des siècles, l’Europe occidentale s’est aseptisée : chasse aux microbes, utilisation (insensée des antibiotiques) etc. Les insectes étant très souvent associés à une image de saleté, ils seraient donc dans l’imagerie populaire de possibles vecteurs de maladies. Retirer les insectes comestibles de notre alimentation permettrait de prévenir les maladies. Or, rien n’est moins vrai. En effet, plus éloignés dans l’échelle de l’évolution de l’être humain que les animaux d’élevage traditionnel, les insectes sont par-conséquent beaucoup moins susceptibles de transmettre des maladies à l’Homme.
Films d’horreur autour des insectes :
un frein pour réintroduire les insectes comestibles en Europe
Une autre hypothèse concernant l’abandon des insectes comestibles en Europe est l’aspect primitif qui a été inconsciemment associé à cette manière de s’alimenter, pratiquée par nos ancêtres lors des cueillettes. Devenir savant, accéder à un statut social, impliquait de stopper ces pratiques d’entomophagie.
L’association fréquente qui est faîte entre les insectes et les dommages agricoles auraient pu amener la population à ne plus vouloir manger des insectes. Cependant, même si une infime partie des insectes peut être tenu pour responsable des dégâts causés aux cultures agricoles, tous les insectes sont par association mis dans le même panier, par l’imagerie collective.
Autre hypothèse : la diminution progressive de la consommation d’insectes par l’être humain s’est faite suite au développement industriel.
La viande est devenue meilleure marché et plus abordable pour les couches les plus pauvres de la société. La consommation d’insectes est devenue obsolète, cédant le terrain aux cultures et aux élevages de viande à très grande échelle.
Pourquoi et comment réintroduire la consommation d’insectes en Europe occidentale ?
Une première piste pour relancer les insectes comestibles serait un changement de mentalité avant tout. En effet, même s’il existe plusieurs ouvrages spécialisés dans la cuisine à base d’insectes, comme « Délicieux ! 60 recettes à base d’insectes » de Romain Fessard, manger des insectes est encore vu comme barbare. Eduquer serait ainsi la première étape pour réintroduire les insectes comestibles en Europe.
Ainsi, mettre en avant des arguments privilégiant les bénéfices en terme de santé que représente la consommation d’insectes, de même que les atouts environnementaux de cette pratique alimentaire pourraient jouer un rôle prépondérant dans la rupture des barrières psychologiques.
